1926 - N° 23 - Notre chant

NOTRE CHANT

Le poète français Rostand, a relaté dans une page célèbre de ses poésies de guerre, l’épisode suivant :

.....Aux premiers jours du choc tragique.
Lorsque nos cavaliers montaient vers la Belgique,
On raconte qu’un soir les cuirassiers français,
Traversaient un hameau des Flandres, je ne sais
Plus lequel, et sur leurs chevaux couverts de roses,
Tous ils chantaient, entre leurs dents, à bouche close,
« La Marseillaise ». Ils la bourdonnaient seulement ;
El c’était magnifique. Et ce bourdonnement
De colère latine au-dessus des corolles,
C’était la conscience et c’était la raison;
Cela faisait un bruit d’orage et d’oraison.
Pieux et menaçant, doré quoique farouche.
Calme. On ne voyait pas remuer une bouche.
Et ce bourdonnement semblait sortir des fleurs.
Et ceux qui l’entendaient croyaient, les yeux en pleurs.
Entendre, dans le soir aux poussières vermeilles,
Comme une « Marseillaise » étrange des abeilles...

Eh bien ! il s’est passé une aussi belle anecdote, l’autre soir, à Liège. Mais comme je ne suis pas Rostand, je m’en vais vous la conter en prose.

C’était un samedi soir, le 13 novembre dernier, les Jocistes de la section Saint-Joseph à Liège se rendaient visiter une verrerie à Vaux-sous-Chèvremont.

Il faut savoir que les Jocistes de « Liége-Saint-Joseph » ont un Directeur très entreprenant, qui a déjà mené ses Jocistes à la visite d’une quinzaine de grands établissements commerciaux et industriels.

Donc les Jocistes de Saint-Joseph, leur directeur en tête, pénètrent dans la verrerie de Vaux-sous-Chèvremont.

L’activité y est grande et un guide aimable leur explique les procédés de fabrication. Nos Jocistes écoutent, regardent... quand tout à coup, trouant le bruit des fours haletants, ils entendirent notre « Marche ».

Quatre cinq Jocistes verriers avaient reconnu dans les visiteurs des camarades, des frères, et leur envoyaient en bienvenue les strophes de notre chant.

Il y eut là, dans cette salle de verrerie, au milieu de ces travailleurs besognant âprement dans le rouge flamboyant, une belle minute de fraternité jociste...

Tournons la page de Rostand ; la nôtre, prise sur le champ d’honneur du travail, est bien plus émouvante...

Si nous voulions, si nous avions davantage au cœur l’amour de nos frères et la fierté de notre mouvement, nous pourrions en écrire de belles pages jocistes !

Les camarades jocistes de la verrerie de Vaux viennent par leur geste d’entrer dans la Légende jociste.

Le Secrétariat général les cite à l’ordre du jour et souhaite que, partout où trois quatre Jocistes travaillent ensemble, ils s’aiment et se soutiennent d’abord, se fassent aimer des autres ensuite.

Les socialistes et les communistes se font surtout craindre de leurs compagnons non socialistes et non communistes. Les Jocistes, eux, se font aimer...

Puis, qu’ils chantent notre chant jociste... L’heure vient où notre chant, notre cher chant jociste, étouffera dans les milieux ouvriers, les clameurs de l’Internationale, car notre chant est un chant d’amour du Christ et des hommes, et cet amour est plus fort que la haine...

FERNET.

SOURCE

La Jeunesse Ouvrière, N° 23, 5 décembre 1926.