1923 - N° 11 - L'Abbé Kolping

Du bienfaiteur les jeunes ouvriers : l’Abbé Kolping

La charité active guérit toutes les blessures, les paroles seules, ne font qu’augmenter la douleur.

Beaucoup de nos camarades auront déjà entendu parler des œuvres de compagnons (Gesellenvereine) créées vers 1850 en Allemagne.

Nous avons pensé qu’il serait intéressant de résumer la vie si active du fondateur de ces œuvres d’apprentis, nous voulons dire l’abbé Kolping.

Né le 8 décembre 1813, à Kerpen près de Cologne d’une famille de pauvres cultivateurs, Adolphe Kolping dut se mettre bien vite à une rude école du travail. Se sentant appelé à la vocation sacerdotale il y renonça pendant plusieurs années afin d’aider par son salaire, ses parents. Le voilà cordonnier. Après deux ans d’apprentissage, il se mit en route pour aller parfaire ses connaissances professionnelles. La coutume du tour d’Allemagne existait encore à cette époque et nul ne se croyait ouvrier accompli s’il n’avait travaille en plusieurs villes à vingt-quatre ans.

Le jeune Kolping abandonna la vie de cordonnier pour prendre place sur les bancs d’un collège de Cologne, quatre ans plus tard il fut admis à suivre le cours de théologie à l’Université de Munich : en 1814 l’ancien jeune cordonnier entrait au grand séminaire de Cologne. En août 1845 il fut ordonné prêtre et nommé vicaire a Eberfeld. ville protestante.

Il y avait à Elberfeld un brave instituteur catholique qui avait réunis quelques apprentis et jeunes ouvriers. Un nouveau vicaire s’intéressa à ce cercle et en devint bientôt l’âme. Ne connaissait-il pas à fond les souffrances, les difficultés, es dangers de ces jeunes gens ? Le cercle prit le nom de Gesellenverein (cercle de compagnons).

Mais on avait remarqué le zèle ardent de l’abbé Kolping et il fut nommé vicaire à la cathédrale de Cologne.

C’était placer l’apôtre en pays de conquête.

L’abbé Kolping définit, dès les débuts de son action à Cologne, le but qu’il poursuivait en créant les Gesellenverein et fut amené à publier son programme. Le Gesellenverein réunit les jeunes ouvriers dans une grande association qui. par les réunions, les fêtes, les offices religieux qu’elle organise, les éloignera des mauvaises distractions de même que par ses hôtelleries et ses « maisons amies » répandues dans toute l’Allemagne, elle leur permettra de trouver toujours un milieu honnête et religieux. « Un membre du Verein » disent les statuts « sera un bon chrétien ».

« Il faut plus de courage pour être un bon chrétien que pour être un mauvais chrétien. »

Le Verein sera considéré comme une seule famille, chaque membre a le devoir de sauvegarder l’honneur et le bien général de la communauté.

Les membres trouvent dans les locaux des jeux, des salles de lecture, une chapelle, bref ils y trouvent un foyer pour jeunes chrétiens.

De Cologne, le mouvement s’étendit à d’autres villes, car il fallait permettre aux jeunes ouvriers faisant leur tour d’Allemagne, de trouver dans les grandes villes le même réconfortant et sûr abri.

L’ardent abbé Kolping suscita partout les dévouements et les générosités nécessaires. Quatre ans après la fondation du Gesellenverein de Cologne, il y avait déjà près de 300 vereine répartis dans toute l’Allemagne.

Partout, « le père des compagnons » comme on appelait l’abbé Kolping, fondait et organisait ses cercles. Qui dira les services rendus aux jeunes ouvriers par cette œuvre ? Munis de leur livret de voyage qui leur indique les endroits possédant un Gesellenverein, avec l’adresse de l’hôtellerie et du président ; les compagnons s’arrangent de façon à arriver le soir dans une de ces localités, où ils sont logés et nourris gratuitement. Il va sans dire que l’on exige de sérieuses qualités morales et religieuses des compagnons. Le contraire eût entraîné beaucoup d’abus. Le compagnon « qui désire s’affilier à un Verein est soumis à un noviciat de trois mois » au cours duquel le président local étudie son caractère et ses mœurs. Enfin pour être admis il fallait être célibataire et âgé de 17 à 27 ans.

L’abbé Kolping recommandait aussi à ces jeunes amis d’être poli en voyage, d’avoir des principes solides car, disait-il, « la lâcheté perd la plupart des jeunes gens ».

Voilà rapidement résumée l’œuvre gigantesque de l’abbé Kolping qui s’étendit peu à peu en Autriche, en Pologne, en France, en Hollande et en Belgique.

Le pauvre vicaire de Cologne lui donna vingt ans de sa vie. Ce labeur avait gravement compromis sa santé et, sentant venir l’heure dernière, il remerciait Dieu de l’avoir fait naître pauvre, de l’avoir obligé de gagner son pain, de l’avoir mis en contact avec toutes les misères dont souffre la jeunesse ouvrière, de lui avoir permis par ses cercles de sauver ces âmes de jeunes dont nul ne se souciait.

Et maintenant encore dans les famille ouvrières chrétiennes d’Allemagne, on lit avec émotion et vénération la vie de ce grand apôtre du XIXe siècle...

C’est une des gloires de l’action sociale chrétienne et, pour nous les jeunes ouvriers du XIXe siècle, Kolping doit rester le précurseur hardi et paternel vers qui se tournent nos âmes reconnaissantes.

FERNET.

SOURCE

La Jeunesse Syndicaliste, N° 1, novembre 1923.