1920 - N° 2 - Nous devons lire

De nombreuses « erreurs » typographiques ont éclaboussé notre premier numéro. Nous nous en excusons auprès de nos amis!L’instruction populaire de notre génération ayant été très négligée !!

Nous devons lire

Nous nous trouvons à la veille de l’hiver.....Il y a même des bonnes gens qui s’abordent par ces mots : Quel froid ! on se croirait en plein hiver..... et qui s’emmitoufflent comme on doit encore le faire en Russie à moins que les bolchevistes soient parvenus à imposer leur dictature au froid !

Ceci dit, une chose est certaine pour nos jeunes syndicalistes ; nous nous trouvons devant un splendide travail de propagande. L’hiver est par excellence, l’époque des réunions, petites ou grandes et il importe que tous nous sachions nous en servir pour répandre partout nos idées. Or comme l’on ne défend bien que ce que l’on connaît bien je vous invite à réfléchir aux conseils suivants.

Au travail d’éducation et de documentation que nous donne notre Cercle d’études du lundi soir il faut que des efforts personnels viennent correspondre. Voyons aujourd’hui la lecture.

Les uns lisent beaucoup mais sans méthode, ressemblant à un promeneur qui parconrerait une forêt en traversant les taillis et les fourrés s’y fatiguant et s’y blessant ; les autres ne lisent pas ou presque pas et restent indifférents aux enseignements du passe et aux leçons du présent. Pour devenir le propagandiste convaincu et convainquant il faut lire et lire beaucoup. Prenez un livre, quelques feuilles de papier détachées et notez-y, au courant delà lecture, les pensées qui vous émeuvent, les citations, les dates, les aveux... puis le livre lu, appliquez-vous à le résumer en deux, trois pages. Plus tard, classez ces pages par ordre de sujet et vous trouverez ainsi, au gré de vos besoins, une petite documentation personnelle qui aura l’inestimable valeur de représenter votre labeur de lecteur.

Ne fermez jamais un livre sans le résumer et j’ose ajouter... sans l’avoir jugé.

Ayez la passion de la lecture studieuse ! Il serait trop facile de vous citer les grandes intelligences qui se formèrent ainsi. Je me borne à un exemple, pris dans l’enfance du célèbre journaliste catholique français ! Louis Veuillot, né de parents ouvriers.

« A quinze ans, dit-il, après être sorti de l’école, j’étais obligé de gagner ma vie. On m’avait accepté comme petit clerc dans une étude d’avoué. Trente francs par mois j’augmentais un peu mes ressources en faisant des copies, à mes moments libres. Et j’employais encore |un autre moyen : il y avait alors des bateliers qui puisaient du sable dans la Seine : je les aidais à transporter et à vider sur la berge les hottes pleines de sable. J’étais payé cinq sous l’heure.

Avec ce profit supplémentaire j’achetais un livre au rabais. »

Notez que ce fils de tonnelier est devenu le plus brillant écrivain catholique du XIXe siècle. Mais aussi quel acharnement à l’étude, à la lecture n’a-t-il pas montré toute sa vie. Retenons son exemple sachons nous priver de distractions, de sorties, pour lire, pour étudier.

Camarades, les heures de notre jeunesse fuient rapides... à nous de les rendre fécondes par notre étude, pour nous et pour le Christ. .

F. TONNET.

SOURCE

La Jeunesse Syndicaliste, N° 2, octobre 1920.